mardi, 03 novembre 2015
La vanité des lettres : L’Écrivain raté de Roberto Arlt
Il est des livres que l’on ne conseillerait pas à des amis écrivains ou aspirants à l’être, sous peine de risquer à les paralyser dans leur travail. L’Écrivain raté de Roberto Arlt est de ceux-là. Non pas qu’il puisse bloquer toute volonté d’écrire à la manière des chefs-d’œuvre de la littérature : devant des pages superbes on réévalue douloureusement son « talent » à la baisse. Le poids des génies du passé est ici évoqué (« Il te semble logique de penser que nous, êtres minuscules, pourrons surpasser ce qu’eux ont si parfaitement achevé ? ») mais l’écrivain argentin fait surtout preuve d’un féroce humour noir pour montrer la futilité d’écrire, l’absurdité d’y consacrer sa vie, le dégoût du milieu littéraire. Désespérant ? Oui mais infiniment drôle quant à la description de ce parcours en nullité exaltée.
L'art de la chute
Pourtant, le jeune auteur qui nous raconte ses malheurs a débuté par un coup de génie, une œuvre époustouflante, applaudie par la critique, adoubée par ses pairs et réclamée par le public : « Des trompettes d’argent exaltaient ma gloire dans les murs de la ville grossièrement badigeonnée et les nuits, dans mes yeux, se paraient d’un prodige antique, connu de personne. » C’est après que les choses se gâtent : plus d’inspiration ! Les idées, envolées. La motivation, désertée. Le talent évaporé. Pourquoi, comment, par quelle malédiction le feu s’est-il transformé en glace ? Nul ne le sait, lui encore moins. La gloire était advenue trop vite, les éloges furent trop flatteurs. La chute du petit paradis mondain n’en fut que plus douloureuse : « Comprenez-vous l’horreur d’une telle situation ? Deux ans, sans rien écrire. Se proclamer auteur, avoir promis monts et merveilles à ceux qui prenaient la peine de nous écouter et se trouver si vite, à brûle-pourpoint, avec la conscience d’être incapable de rédiger une ligne originale, d’accomplir quelque chose qui justifie le prestige résiduel. Comprenez-vous bien combien s’avère blessante cette infâme question de prétendus amis qui, s’approchant de nous, disent sur un ton naïf où transparaît indéniablement une malignité satisfaite : – Pourquoi ne travailles-tu pas ? ou bien : Quand est-ce que tu publies quelques chose ? »
14:00 Publié dans Littérature | Tags : absurdité, argentine, club des non-écrivains, critique littéraire, décalogue de la non-action, fatuité, inspiration, l'écrivain raté, la vanité des lettres, motivation, rentrée littéraire, roberto arlt, sylvain métafiot, talent, gazettarium | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 13 juin 2015
Hic & Hec de Mirabeau : gîte en bois pour un feu de poutre
« Ils veulent que chacun soit aveugle comme eux
C’est être libertin que d’avoir de bons yeux. »
Molière
Du comte de Mirabeau (1749-1791) nous connaissons surtout le personnage révolutionnaire, le tribun parlementaire, auteur d’essais politiques contre le despotisme et de discours enflammés. Pourtant, à l’égal de certains de ses plus illustres contemporains (Laclos, Casanova, Sade, Diderot, Crébillon) Mirabeau excella dans le genre du roman libertin, souvent sous couvert d’anonymat. Publié après la mort de l’écrivain, Hic & Hec s’inscrit dans la lignée d’Erotika Biblion et du Rideau levé, ou l’éducation de Laure. Un petit roman licencieux dont Apollinaire affirmait qu’il « a été écrit avec une grâce et un esprit qui sont rares » et dont la lecture peut redonner son ardeur d’antan au plus frigide des ancêtres.
Ici l’on s’égare
Hic-et-Hec c’est ainsi que se nomme le héros de cette histoire. Jamais appelé autrement que par « ceci et cela », ce jeune androgyne délicat goûtera ainsi aux divers plaisirs de la chair, tant avec les femmes qu’avec les hommes, dans des bras novices autant que dans ceux de ses ainés, alternant les jeux et les joutes sexuelles avec la même avidité. Puritains, détournez les yeux ! L’éloge des amours interdites commence dès les premières pages de cette douce aventure dévergondée.
Les mains baladeuses de son maître d’école seront ainsi les premières à éveiller les recoins mystérieux du corps du jouvenceau. Tantôt par d’indécentes caresses, puis par des coups de verges bien senties que le jeune écolier retournera, avec la même « tendresse », à son régent Jésuite : « Enfin je m’enhardis et, empoignant son sceptre comme il avait fait du mien, je le fustigeai si vertement qu’il versa des larmes de plaisir. […] Il fut mon Socrate, je fus son Alcibiade ! Tour à tour agent et patient, il mit sa gloire à perfectionner mon éducation. »
11:56 Publié dans Littérature | Tags : gazettarium, abbé, église, évèque, fesses, feu de poutre, gîte en bois, hic & hec, inceste, libertin, littérature érotique, mirabeau, morale au bordel, mythologie, nietzsche, pédophilie, pénis, sade, sapho, scandale, sensualité, sexe, sylvain métafiot, tabous, tétons, vagin, valbouillant | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 20 mai 2015
Je n’ai aucune idée sur Hitler
De mai à septembre 1933 Karl Kraus dresse le portrait de la barbarie en marche. D'un ton ironique teinté d'une indignation viscérale, il relate l'écrasement de la civilisation européenne sous la botte du régime nazi. Extraits :
« Comment l'étonnement ressenti face à ce renouveau qui détruit des concepts fondamentaux avec la force élémentaire d'une peste du cerveau (comme si les bombes bactériologiques de la guerre aérienne hautement sophistiquées étaient déjà en usage) pourrait-il donner du courage à celui qui est sans voix et perçoit ici à quoi ressemble le monde qui s'est pris au mot ? Alentour, rien que stupeur, sidération face à l'envoûtant prodige d'une idée qui consiste à n'en avoir aucune. Face au coup de boutoir qui a pris tout droit le chemin allant de rien à nulle part. Face à l'inspiration d'un plan quadrimillénaire disant que le paradis humain commence tout de suite après l'enfer réservé à son prochain ; et que toute souffrance d'ordre obscur affublée de notions telles que "transfert" et "réescompte" va prendre fin dans un chaos illuminé, dans le rêve chiliastique de millénaristes déchaînés : simultanéité d'électrotechnique et de mythe, de désintégration atomique et de bûcher, de tout ce qui existe déjà et n'existe plus ! »
Humour blond
« À la question "Pourquoi les gens de culture soignent-ils leurs cheveux avec Javol ?", la réponse d’un poète, avec illustration :
"Javol" me fait beaucoup de bien.
Je l’utilise chaque matin
Pour tonifier ma blonde toison,
Rafraîchir mon crâne de poète
Et d’une façon générale parce que c’est bon.
Pour les cheveux, la peau et la tête.
Jawohl ! Voilà donc le poète qui surveille la porte spirituelle ouvrant sur le Troisième Reich. »
21:26 Publié dans Littérature, Politique | Tags : je n’ai aucune idée sur hitler, karl kraus, sylvain métafiot, nazi, sa, wagner, nietzsche, mensonge, meutre, crimes, juifs, allemagne, 1933 | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 20 avril 2015
Le château de Boukovsky
Alors qu'il était emprisonné en Union Soviétique, le dissident politique Vladimir Boukovsky imagine un refuge idéal et sombre, lieu d’une absolue liberté, inaccessible aux geôliers, indestructible au vent mauvais du despotisme : un château. Une « construction de ténèbres brutes, comme le décrit Annie Le Brun dans Les Châteaux de la subversion, surgie par la folle volonté d’un regard. D’un regard qui invente son dernier recours et le figure noir sur noir » :
« Instruit par l’expérience, j’essayais d’emporter dans le mitard une mine de crayon que je calais habituellement dans ma joue. Quand j’y parvenais, alors je passais tout mon temps de cachot à dessiner des châteaux forts sur des bouts de journaux ou simplement sur le sol, sur les murs… Je ne traçais pas seulement une vue d’ensemble. Je m’étais donné pour tâche de construire l’édifice en entier, depuis les fondations, les sols, les murs, les escaliers en colimaçon et les passages secrets jusqu’aux toits pointus et aux tourelles. Je taillais chaque pierre, je posais avec soin les dalles ou les lattes de plancher, je meublais les salles, j’accrochais les tapisseries et les tableaux. J’allumais les bougies des chandeliers et les torches qui fleuraient la résine et fumaient doucement, dans les corridors sans fin… Je dressais les tables et je conviais des hôtes. J’écoutais de la musique avec eux, je buvais du vin dans des coupes anciennes. J’allumais ensuite, ma pipe, tout en prenant une tasse de café. Nous montions l’escalier, passions de salle en salle ; de la terrasse, nous contemplions le lac ; nous allions aux écuries voir les chevaux ; nous nous promenions dans le jardin qu’il avait fallu aussi dessiner et planter des espèces les plus variées. Nous regagnions la bibliothèque par l’escalier extérieur et là, après avoir fait du feu dans la cheminée, je m’installais dans un fauteuil bien rembourré, profond. Je feuilletais des livres anciens, aux reliures de cuir usées et aux lourds fermoirs de cuivre. Je savais même ce qui était écrit dans ces livres. Je pouvais les lire…
20:07 Publié dans Littérature | Tags : le château de boukovsky, sylvain métafiot, annie le brun dans, les châteaux de la subversion, union soviétique, prison, vladimir boukovsky, absolue liberté, ténèbres, noir | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 07 avril 2015
Jérôme Leroy : « 95% des livres sont inoffensifs »
Article initialement publié sur Le Comptoir
Depuis vingt-cinq ans, l’œuvre au noir de Jérôme Leroy se déploie sur une dizaine d’ouvrages traversés par des tueurs cinéphiles, des ordures politiques, des poètes subversifs, des éclats de violence désespérée et une ivresse conjuguée du vin, de l’amour et du beau style. À l’occasion du festival Quais du Polar, à Lyon, où son dernier roman, « L’Ange gardien », a reçu le Prix des lecteurs, nous avons rencontré ce hussard de gauche entre deux séances de dédicaces.
Dans La Chartreuse de Parme, Stendhal écrit : « La politique dans une œuvre littéraire, c’est un coup de pistolet au milieu d’un concert, quelque chose de grossier et auquel pourtant il n’est pas possible de refuser son attention. » Dans L’Ange gardien, vous affirmez qu’écrire des romans noirs, c’est parler de son temps. En quoi ce genre littéraire est-il le plus à même de mettre le nez du lecteur dans le réel ?
Pour une raison bien simple, qui tient de l’ADN du roman noir qui a commencé, pour aller vite, en 1929 avec La Moisson rouge de Dashiell Hammet, au moment de la Grande Dépression. C’est une littérature qui s’intéresse essentiellement aux contractures présentes dans le corps social. Elle est ainsi plus à même de coller au réel car elle est l’héritière de deux choses. Tout d’abord, la tragédie classique : par rapport au roman policier, le roman noir est une tragédie, on en connaît la fin, le monde va mal. Elle est également l’héritière du roman réaliste du XIXe siècle – des Misérables de Victor Hugo aux romans d’Eugène Sue – qui fait entrer toute une catégorie de la population (ces fameuses « classes dangereuses ») dans le roman, donc toute une catégorie de problèmes qui vont avec.
À la question « à quoi sert la littérature ? », vous répondiez « À blasphémer. Le blasphème est la seule fiction qui puisse dépasser la réalité. » Là, il ne s’agit plus de coller au réel mais de le gifler, de faire, comme vous dites, « le beau travail du négatif, celui qui bouleverse, détruit, sape toutes les certitudes politiques et morales d’une société ». Mais cela suppose que la littérature soit intrinsèquement subversive alors que, concrètement, beaucoup de livres sont inoffensifs.
Bien sûr, je crois que 95% des livres sont inoffensifs. Le travail du négatif est essentiellement l’œuvre du roman noir et d’une certaine forme de pensée radicale. Les deux éditeurs français auxquels je fais confiance dans ce domaine sont La Fabrique et la collection Série noire de Gallimard. À ce titre, l’idée de blasphème, de sabotage, de l’écrivain qui apporte des mauvaises nouvelles, provient de mon influence, revendiquée, pasolinienne.
Par ailleurs, j’admire des écrivains de droite parce qu’ils ont une certaine façon d’être dans le style, dans une légèreté, une insolence vis-à-vis des institutions. C’est quand vous êtes minoritaire que vous êtes insolent. Dans un paysage d’après-guerre dominé par la gauche communiste très « stal bas-du-front » (à part Aragon et Roger Vailland), Sartre et l’engagement obligatoire, et le nouveau roman qui chassait le sujet, des écrivains comme Roger Nimier, Antoine Blondin, Jacques Laurent ou Michel Déon étaient des respirations et ils le sont toujours. Il en va de même avec A.D.G. dans le polar, car il mérite qu’on se souvienne de lui.
19:05 Publié dans Littérature | Tags : 95% des livres sont inoffensifs, blasphème, cinéma de genre, communisme balnéaire, dernières nouvelles de l'enfer, disneyland préfasciste, george romero, guy debord, jérôme leroy, john carpenter, julien chambon, l'ange gardien, le bloc, le comptoir, littérature, lyon, monnaie bleue, orwell, paul signac, poésie, quais du polar, roman noir, série noire, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 11 février 2015
L'invention de Morel ou la projection hallucinée
Quel est ce parfum qui flotte autour du narrateur et l'obsède ? Celui, moite et âpre, de la flore de l'étrange île sur laquelle il s'est réfugié ? Celui de Faustine, ce fantôme charnel qui l'ignore superbement ? Ou bien celui de la folie, cette vapeur empoisonnée qui s'insinue dans son cerveau brûlé par le soleil ?
Le narrateur est pourtant rationnel, son journal en atteste. Mais si la science dépassait le cadre de la réalité, la folie qui en découlerait ne serait-elle pas la norme ? Les machines n'ont pas d'odeur et pourtant l'invention de Morel sent le souffre : diabolique, transgressive, parfaite. Au bout du conte, la question n'est pas de savoir si la frontière entre le réel et l'halluciné a été franchie mais s'il existe encore une frontière.
Le narrateur a fuit la prison des hommes mais se retrouve enfermé dans l'ombre d'un seul, le sien, condamné à revivre éternellement la plus pure des illusions. L'image est immortelle.
Sylvain Métafiot
19:11 Publié dans Littérature | Tags : l'invention de morel, projection hallucinée, littérature, sylvain métafiot, litterarium, gazettarium, adolfo bioy casares, folie, image, parfum, île, machine, frontière, illusions | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 19 décembre 2014
Le cercle de la boue : L’Enfer de Verdun de Félicien Champsaur
Après avoir réédité L’Orgie Latine en 2013, c’est une nouvelle curiosité littéraire de Félicien Champsaur que les noctambules du Vampire Actif ont déterré : L’Enfer de Verdun, un court texte écrit en janvier 1917, constituant la préface d’une « pièce de théâtre hybride, au vitriol », L’Assassin innombrable. Un témoignage cru de l’horreur de la guerre de 14, cette grande boucherie rouge et pâteuse.
En 1916, la guerre et son cortège d’armes industrielles a fait 240 000 morts du côté allemand et 260 000 morts français. Et c’est la bataille la plus épouvantable, celle de Verdun, que le jeune écrivain, aujourd’hui oublié, raconte de manière détaillée. Quand il se rend sur place, Verdun est en ruine (« Des rues entières sont effondrées, et la rue Mazelle, entre autres, n’est qu’un charnier de pierres et de poutres, de pans de murs, restes et tronçons de façades écroulées. […] La cathédrale où nous entrons, est mystérieuse, émouvante, avec tant de trous dans sa robe de granit, les dentelles déchirées de ses fenêtres et de ses vitraux… »). Elle a subit une bataille terrible où les poilus se terraient dans des trous humides ou derrière de simples pans de murs effondrés pour échapper à l’orage d’acier de l’artillerie allemande (1250 pièces de tous calibres). Cherchant à faire ployer la citadelle, les Allemands bombardent sans discontinuer une armée qui « devient insomniaque, nerveuse, angoissée, promise à la mort. » (Pierre Miquel). La violence des coups de canon dans la nuit rend l’atmosphère électrique : « nous semblons, les uns aux autres, les seuls êtres vivants, et nous écoutons au cœur de l’angoisse de la nuit, d’ennemis invisibles, l’appréhension de la force des tonnerres humains, de leur gueule sonores et brutales. Pour la première fois, je contemple la Guerre, et je guette avidement ses regards de feu, du côté de Douamont et de Vaux, les beautés espacées et puissantes de son souffle. »
15:35 Publié dans Littérature | Tags : boue, cadavres, charniers, fange, félicien champsaur, guerre de 14-18, l'enfer de verdun, le vampire actif, propagande, sang, soldats, sylvain métafiot, tranchées, littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 30 septembre 2014
Les aventures de Demolition Man dans l'empire du Bien
An de grâce 2032. Sylvester Stallone, aka Demolition Man, est libéré de sa cryo-prison pour maraver un Wesley Snipes trop cabotin...
***
02:29 Publié dans Cinéma, Littérature | Tags : demolition man, roman-photo, sylvain métafiot, cinéma, empire du bien, sylvester stallone, sandra bullock | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 12 août 2014
À rebours avec Huysmans
« C'est l'histoire d'un misanthrope qui se coupe du monde pour se nourrir de son propre fonds (l'histoire d'un homme assis, dira-ton, à la manière d'André Gide). C'est aussi l'histoire d'un malade que sa névrose contraint à vivre en vase clos. L'histoire d'un aristocrate en rupture avec ses contemporains qui se consacrent au culte de l'argent. L'histoire d'un esthète qui amasse des valeurs dont il perçoit les dividendes sous les espèce d’œuvres d'art et d'ouvrages littéraires. L'histoire d'un amateur d'autres mondes, qui s'exile derrière le miroir afin de se laisser porter par ses rêveries, ses rêves, ses souvenirs ou ses réflexions. Ou encore celle d'un homme qui, ayant la conviction de vivre une période de « décadence », l'incarne dans son propre corps, dans chacun de ses goûts, chacune de ses activités, transformant une conception de l'Histoire en art de vivre. »
Présentation de Daniel Grojnowski
19:31 Publié dans Littérature | Tags : À rebours, huysmans, sylvain métafiot, xixe siècle, décadent, baudelaire, roman, daniel grojnowski, dandy, schubert, des esseintes, l'antienne de pantin, l'apparition, gustave moreau, dégoût, misanthrope, névrose, art, littérature, aristocrate, esthète | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 04 août 2014
Le charabia des philosophes
Dédicace à Hegel, Martin Heidegger, Jacques Lacan, Jacques Derrida, Roland Barthes, Alain Badiou, Michel Foucault, Slavoj Žižek, Bernard Stiegler, Peter Sloterdijk... et tous les jargonneux prétentieux.
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« Le truc consiste à artistiquement écrire d'une façon obscure, c'est-à-dire incompréhensible. La vraie subtilité consiste à arranger son galimatias de manière à faire croire au lecteur que c'est lui qui se trompe s'il ne comprend pas, alors que l'écrivain sait très bien qu'il est seul responsable, vu qu'il ne dit rien de clairement compréhensible, de clairement pensé. [...] Chaque misérable scribouillard [peut ainsi se délecter] dans une obscurité prétentieuse, barbante, de façon à laisser croire qu'il n'y avait pas de mots en mesure d'exprimer ses éminentes ou profondes pensées. Au lieu de s'efforcer par tous les moyens d'être clair pour le lecteur, il semble lui crier d'un air narquois : "Je suis sûr que tu ne peux deviner ce que j'ai dans l'esprit !" Si ce dernier, au lieu de répondre : Va te faire voir ! Et de jeter le livre, s'efforce en vain à y voir clair, il finit par croire que le livre doit être quelque chose de très habile, dépassant sa capacité de compréhension, et, haussant les sourcils, qualifie l'auteur de penseur profond. »
Arthur Schopenhauer, Parega et Paralipomena
20:07 Publié dans Littérature | Tags : charabia, philosophes, sylvain métafiot, jargon, prétentieux, verbeux, obscurs, jeanne hersch, hegel, martin heidegger, jacques lacan, jacques derrida, roland barthes, alain badiou, michel foucault, slavoj Žižek, bernard stiegler, peter sloterdijk, raffaele la capria, henri bergson, arthur schopenhauer, illisible, clareté, lumière | Lien permanent | Commentaires (0)