mardi, 04 décembre 2012
Claquage de barres et pétage de côtes
« C’est juste pour rire » : ainsi parle la populace. Ce type de rire se présente lui-même comme une forme d’exutoire à bon marché. On ne rit pas pour s’élever au-dessus de sa condition commune, mais on rit justement de ceux qui voudraient le faire, sous prétexte que «on est tous humains, après tout...». Tel est l’humour démocratique : égalitaire et plat. Qu’aujourd’hui l’humour se vende aussi bien ne peut d’ailleurs que susciter notre méfiance.[1]
02:06 Publié dans Actualité | Tags : claquage de barres et pétage de côtes, humour, grand rire, hara-kiri, charlie hebdo, chroniqueur, masse, anne roumanoff, dany boon, laurent gerra, omar & fred, kad merad, eric & ramzy, cyril hanouna, rémi gaillard, chevallier et laspalès, anthony kavanagh, françois l'yvonnet, homo comicus, le tribunal des flagrants délire, south park, gaspard proust, fellag, pacôme thiellement, tous les chevaliers sauvages, dieudonné, comte de bouderbala, À votre écoute coûte que coûte, stéphane guillon, sophia aram, sacha guitry, alexandre vialatte, coluche, raymond devos, nietzsche, ainsi parlait zarathoustra, sylvain métafiot, pierre alhammoud | Lien permanent | Commentaires (4)
dimanche, 14 décembre 2008
Mesrine, une légende autoproclamée
Jacques Mesrine appartient à l’imaginaire français, celui de la France de la guerre d’Algérie et de Valéry Giscard d’Estaing, des quartiers de haute sécurité (les fameux QHS), du grand banditisme et de la Gauche révolutionnaire. Alors, comment le réalisateur Jean-François Richet (Ma 6-t va crack-er et le remake du film de John Carpenter Assaut sur le central 13, c’est lui) et l’acteur Vincent Cassel ont-ils retranscrits la vie de cet homme ? Icône de la rébellion, beauf provocateur, gangster assassin, Robin des bois, pourfendeur du système étatique ? Richet filme le célèbre gangster français « tel qu’il était et non tel que j’aurais aimé qu’il soit » selon ses dires. Le film retrace 20 ans de sa vie en deux parties (L’Instinct de mort et L’Ennemi public n°1).
A l’heure des biopics (la retranscription cinématographique de la vie d’une « personne d’exception »), Richet à su se démarquer remarquablement de la masse (Coluche, Sagan, etc.) en décrivant un homme toujours situé en marge des corps constitués, qu’il s’agisse de la société, qu’il ne cesse de brocarder en paroles et en actes, des groupuscules révolutionnaires (dont il n’épousera jamais les idéaux, même si, avant son assassinat, il projetait de rencontrer les Brigades rouges) ou du milieu, dont il se tiendra constamment à l’écart. Selon Richet, « Mesrine est un homme qui s’est construit dans la négation ».
Les évènements (braquages, enlèvements – dont un propice à une bonne séquence de rigolade, arrestations, séjours en prison, etc.) s’enchaînent au pas de charge, épousant l’instinct sûr et mortifère de son personnage. Richet s’en tient strictement aux faits avérés et à l’autobiographie romancée (L’instinct de mort, 1977), écrite par Mesrine lui-même dans sa cellule de la prison de la Santé, quelques jours avant son procès. Richet à l’intelligence de ne pas politiser son sujet : égoïste, réfractaire à toute forme d’autorité et de responsabilité (la famille, lieu étouffoir), Mesrine, en convertissant l’argent volé en bijoux et aux autres grosses cylindrées, ne s’attaque pas au capitalisme, mais le flatte, comme lui fait justement remarquer Charlie Bauer, un activiste d’extrême gauche avec lequel il fricotera à la fin des années 1970. Comme le remarque Jean-Baptiste Thoret : « Le réalisateur maintient toujours un écart entre son « héros » et ces luttes armées qui constituent le bruit de fond des années 1970 (on entend partout le coup d’Etat de Pinochet, l’assassinat d’Aldo Moro, les violences de la bande à Baader, etc.). »
A propos du style, le réalisateur explique : « Dans L’Ennemi public n°1, Vincent Cassel pèse 20 kg de plus. Ce n’est plus le même corps, les mêmes mouvements, le même coffre. L’Instinct de mort est un film de stratégie et de facture très classique, de la famille des films de Melville, celui du Cercle rouge. L’Ennemi public n°1 possède une structure anarchisante, presque expérimentale, qui colle alors à ce que devient Mesrine. Comme modèle, j’avais en tête le souvenir, flou mais persistant, du French Connection de Friedkin. »
La ressemblance de l’acteur avec le bandit est en effet saisissante. Cela fait penser, toutes proportions gardées, à Robert De Niro incarnant Jake La Motta dans le chef d’œuvre Raging Bull. Mais, la comparaison s’arrête au plan physique : Cassel n’est pas De Niro, Richet n’est pas Scorsese.
Jean-François Richet reste toujours au plus près d’un personnage déterminé et naïf, courageux et parfois ridicule, tragique et très consciencieux qui ne sera jamais tenté par devenir « le chef » ou le représentant de la lutte gauchiste de l’époque. Pas le moindre plan d’un citoyen lambda venant dire à la caméra sa solidarité avec Mesrine. L’homme ne représente personne d’autres que lui-même (à l’exception des QHS, qui le révulsent, seul son destin le préoccupe), parti pris qui protège le film du risque de l’édification et de la glorification.
« N’ayant pas de fascination particulière pour le personnage, je me suis attaché à l’être humain, ni plus ni moins », avoue Richet, ajoutant « J’ai tenu à montrer qu’il n’y a pas de héros dans le gangstérisme ». Mesrine ? Un beauf avec un flingue qui écrit sa propre légende (dans son bouquin il revendique 39 meurtres, ce qui est faux pour 37 d’entre eux) ; qui ne doit, cependant, pas vous empêcher de le découvrir sur grand écran.
Sylvain Métafiot
02:02 Publié dans Cinéma | Tags : jacques mesrine, mesrine, cinema, richet, cassel, thoret, charlie hebdo, sylvain métafiot, beauf, flingue, violence, france, critique, pinochet, coup d'état, l'instinct de mort, ennemi public n1, braquages, biopics, coluche, sagan | Lien permanent | Commentaires (2)